La modernité s’inspire souvent de la tradition. C’est le cas pour les végétalisations, descendantes directes des toits de boue. Mais elle peut aussi s’en éloigner, à l’exemple des toits de production, innovants par leur usage comme par leur financement
Toitures végétalisées : un peu d'histoire
Traditionnellement, la végétalisation des toitures dépend essentiellement du climat. Lorsqu’il fait très sec, dans le Bassin Méditerranéen ou en Afrique, les toits sont en paille et boue séchées en torchis, voire en bouse. À l’inverse dans les pays battus par les pluies, le toit se couvre de tourbe ou de prairie. Entre les deux, dans nos régions, les anciens avaient choisi une sorte de compromis avec le chaume.
Aujourd'hui, il n'est plus question de remettre le chaume au goût du jour. Cependant, la végétalisation des toitures intéresse toujours plus les architectes. Tout d'abord parce qu'elle permet d'apporter un peu de verdure dans des océans de béton. Ensuite, parce que la végétation a son rôle à jouer en terme de régulateur thermique, même si elle ne remplace absolument pas une bonne isolation.
Si les anciens maîtrisaient la toiture terrasse avec les exigences qui étaient les leurs - les pays scandinaves notamment regorgent de très beaux exemples de toitures végétalisées - la technique débarque en Europe dans les années 70 en même temps que les membranes assurant l'étanchéité. Pour inviter les jardins sur nos toits, encore fallait-il trouver une solution pour éviter que les végétaux ne colonisent de leurs racines le dessous de la toiture et ne mettent à mal l'isolation... les premières toitures végétalisées extensives sont apparues en Allemagne avant de faire leur arrivée en France dans les années 90.
La toiture végétalisée, telle que nous l'entendons ici, n'est pas une sorte de toit-terrasse accueillant un jardin au milieu duquel le promeneur peut venir faire sa balade matinale. La toiture végétale n'est pas accessible et la végétation que l'on y fait pousser ne demande pas - ou très peu d'entretien - et se développe de sorte à constituer un écosystème stable qui n'a pas besoin de la main de l'homme pour survivre.
La végétalisation est pratiquement sans effet sur l’isolation thermique du toit, elle est donc toujours mise en œuvre avec une isolation complémentaire classique.
Les avantages des toitures végétalisées
Végétalisation extensive
Les jardins de Babylone ont acquis leur statut depuis fort longtemps. Le jardin en terrasse n’est donc pas un signe de nouveauté. Mais il s’agit là d’une culture classique, avec une couche de plusieurs dizaines de centimètres de terre, qui impose une structure porteuse en conséquence, capable de supporter jusqu’à 700 kg au mètre carré de charge statique supplémentaire.
La nouveauté réside donc dans le développement de la végétalisation extensive qui peut se définir par l’installation de végétaux peu exigeants sur un toit standard, plat ou à faible pente. Le système moderne mesure moins de 15 cm d’épaisseur au total. Il est posé sur le revêtement d’étanchéité. Enfin, le choix des végétaux permet un développement naturel, sans entretien spécifique ou presque. Le tout affiche un poids considérablement allégé, entre 60 et 180 kg au mètre carré, parfaitement compatible avec les exigences réglementaires actuelles. Cela permet donc de végétaliser un grand nombre de bâtiments.
Le complexe de végétalisation, outre les plantes et leur substrat, comporte impérativement un ensemble d’éléments, disposés en couches, pour le drainage (évacuation des eaux stagnantes), le filtrage (migration du substrat), etc. Il s’agit donc d’un ensemble complet.
Confortables l'été
La végétalisation est pratiquement sans effet sur l’isolation thermique du toit. Elle ne suffit pas par elle-même à atteindre les valeurs recommandées par la réglementation, en rénovation comme dans le neuf. Elle est donc toujours mise en œuvre avec une isolation complémentaire classique, positionnée sous l’étanchéité, voire en support de culture (isolation inversée), ou les deux (dessous, dessus).
En revanche, elle est très utile en confort d’été. Les végétaux contribuent à réduire fortement le facteur solaire. L’humidité du substrat rafraîchit l’ensemble par évapotranspiration. Enfin, le déphasage thermique induit en période de canicule est mieux arrêté par l’isolation thermique sous-jacente.
La végétalisation améliore également le confort acoustique. Elle protège l’étanchéité et contribue à mieux réguler les capacités d’évacuation du réseau d’eaux pluviales. Attention toutefois, lors de fortes pluies, le système peut être saturé et ne plus faire office de régulateur. Les capacités du réseau d’évacuation de la pluie sont donc les mêmes que celles d’un toit classique.