Le type haussmannien résulte d’une volonté et d’un plan de remembrement urbain qui ont imposé des règles strictes de hauteur, d’alignement et d’ornementation des façades. Ces règles ont été reprises dans de nombreuses villes par la suite et ont perduré jusqu’après la première guerre mondiale et les années 1920. Il signe la rénovation des centres urbains par la disparition des cœurs médiévaux aux ruelles étroites et tortueuses. Côté intérieur, l’appartement haussmanien est un vrai « tube » de la rénovation.
Style
Les façades des immeubles sont officiellement en pierre de taille même si de nombreuses réalisations, notamment en fin de période, ne sont qu’enduites, la modénature étant obtenue par façonnage. Outre l’ordonnancement des fenêtres, le travail sur les garde-corps des balcons est remarquable ainsi que les toits à brisis, « à la Mansart ». Ces derniers sont parfois recouverts d’ardoises mais plus souvent de zinc. Les lucarnes éclairant les mansardes aménagées sous les toits signent ces derniers. Leur forme et leur nombre varient beaucoup d’un immeuble à l’autre.
LE NUANCIER HAUSSMANIEN
Côté Architecture
Le reflet d'une époque
Le Baron Haussmann s’est employé à désencombrer la capitale. L’époque est marquée par les grands travaux d’infrastructure tels que le chemin de fer, l’industrialisation, le développement urbain et… des habitudes particulièrement brutales de mettre en œuvre ces chantiers. Haussmann est donc le maître d’ouvrage d’une vaste opération de réhabilitation urbaine, consistant à trancher dans le vif, raser l’existant et reconstruire à neuf. Cette transformation a perduré après lui et a essaimé dans de nombreuses villes de France, concernées à la même époque par les mêmes problèmes. Ainsi, les réalisations d’Haussmann ne relèvent pas des usages antérieurs et ne sont pas le fruit des projections d’un architecte unique. Ce n’est donc pas un « style » mais une typologie, le reflet d’une époque, tel un instantané des mœurs et techniques de la fin du XIXe siècle, qu’il s’agisse des réglementations, des modes constructifs, de la représentation sociale ou des préoccupations d’hygiène et de confort. A la différence des gares de chemin de fer de cette période, toutes développées sur le même plan, il n’existe pas un modèle unique d’immeuble haussmannien. Mais ils se repèrent du premier coup d’œil.
Haussmann est le maître d’ouvrage d’une vaste opération de réhabilitation urbaine, consistant à trancher dans le vif, raser l’existant et reconstruire à neuf.
L'organisation intérieure
Les appartements sont desservis par deux escaliers. Le principal débouche sur le hall d’entrée et distribue les 5 étages d’appartement. L’escalier de service se situe à l’arrière du bâtiment, rejoint les étages par les cuisines et monte jusqu’au comble : le personnel de maison ne croisait pas les résidents. Les appartements sont aménagés selon un plan en enfilade avec, en façade, le salon, la salle à manger, la chambre principale. Côté cour, on retrouve les autres chambres, les pièces de service et les salles d’eau. L’accès depuis le palier donne sur une antichambre qui ouvre sur un couloir central.
De bas en haut et sur l’arrière
Un immeuble haussmannien est défini par des règles d’urbanisme. Il comporte généralement 5 étages et un comble mansardé. Le rez-de-chaussée est souvent réservé aux boutiques en façade. L’entresol, juste au dessus, est occupé par la conciergerie. Il est bas de plafond pour se raccorder au niveau de la porte cochère. L’étage suivant est le plus raffiné. Sa hauteur sous plafond est souvent plus importante, son ornementation plus riche et il dispose d’un balcon filant. Les étages supérieurs se ressemblent. Ils n’ont pas de balcon sauf le cinquième. Les combles sont réservés aux domestiques. La façade se caractérise par une apparence de pierre de taille (sur l’arrière, c’est plutôt plâtre et chaux). De nombreuses fenêtres, toutes identiques, sont percées pour faire entrer la lumière, si rapprochées qu’elles ne permettent plus l’usage de volets battants. La porte cochère, haute de deux niveaux, donne accès à la cour intérieure où sont élevés d’autres bâtiments et les annexes de service, les écuries notamment.
Côté Rénovation
Une histoire de cheminées
Tous les appartements haussmannien sont équipés de conduits de cheminée. Au fil des années et des transformations, ces conduits ont connu de nombreuses vicissitudes jusqu’à leur emploi pour faire passer des réseaux électriques ou de la ventilation. Il n’y a donc aucune garantie sur l’intégrité de ce conduit, entre l’appartement et la souche de toiture. D’autre part, depuis le 1er janvier 2015, par arrêté préfectoral, il est interdit de faire du feu dans un foyer ouvert à Paris. La mesure ne concerne pas les foyers fermés. Mais attention une fois encore : la mise en place d’un insert impose une modification du conduit souvent techniquement impossible.
1. Les sols
Le parquet, noblesse de chêne
L’appartement se caractérise par son parquet dans les pièces de vie et son carrelage dans les espaces de service. Le parquet est souvent du type Point de Hongrie, les lames forment des chevrons bien alignés. Un plancher comporte une structure porteuse, composée de poutres supportant des solives, sur lequel est rapportée une épaisseur de béton de chaux maigre, sur lequel sont posées les lambourdes du parquet. La remise en état est donc relativement facile, de même que la récupération du parquet d’origine sous réserve de remplacer les quelques lames abîmées. La pose nécessite toutefois une certaine minutie pour conserver les alignements : un décalage est encore plus difficile à rattraper qu’avec un parquet classique.
Dans les communs, le carrelage
Au fil du temps, le carrelage d’origine a souvent disparu sous divers revêtements de sol collés ou coulés. Il est rarement possible de le remettre en état et n’en présente généralement pas l’intérêt. En revanche, il peut être intéressant de reproduire le motif, souvent bicolore, avec du carrelage neuf ou en réédition. La pose classique à bain soufflant sera avantageusement remplacée par un ragréage autolissant suivi d’une pose collée.
Conserver les caractéristiques premières de l'appartement Haussmannien tout en améliorant son bilan énergétique se joue finalement sur des principes simples, adaptés au cas par cas.
2. Réhabilitation thermique
Eco ou pas éco ?
Avec des plafonds culminants parfois à plus de 3 mètres, des menuiseries de grande hauteur et une distribution des pièces sur un couloir central, l’appartement haussmannien n’est pas le champion de l’éco-conception. Mais il a des atouts, à commencer par l’épaisseur de ses maçonneries, et ses apports solaires, pour peu qu’il bénéficie d’une bonne orientation et d’un étage élevé. Conserver ses caractéristiques premières tout en améliorant son bilan énergétique se joue finalement sur des principes simples, adaptés au cas par cas.
Renforcer l’isolation
Pour l’isolation thermique, dans le cas des pièces lambrissées, la meilleure solution est le soufflage d’un isolant en vrac (laine de roche, chanvre…) dans le volume entre la maçonnerie et la boiserie. Pour des parois sans doublage, il faut en créer un de type plaques de plâtre sur ossature, ce qui impose de reproduire les ornementations d’origine. Compte tenu de l‘imposante épaisseur des façades, il est possible de limiter l’épaisseur du doublage aux alentours de 5 cm. Pour les planchers, seule une correction acoustique est éventuellement nécessaire.
Des fenêtres performantes
Les menuiseries sont remplacées à l’identique, c’est-à-dire en bois et à petits bois mais avec un double ou triple vitrage à faible émissivité. Les occultations doivent être rétablies si elles ont disparues, l’idéal étant les persiennes extérieures, non pour l’hiver mais pour le contrôle solaire d’été. Ces travaux s’accompagnent d’une chasse systématique aux courants d’air parasites de façon à rendre l’appartement le plus étanche possible. Cela concerne la porte d’entrée, mais aussi les conduits de cheminée. Le renouvellement d’air est alors assuré par une VMC simple flux hygroréglable de type B installée dans une pièce humide, les toilettes par exemple, avec sortie murale sur cour. Les entrées d’air sont intégrées dans les menuiseries des pièces de vie.
Chauffage classique ou invisible
Pour la production d’énergie, l’installation de chauffage commune à tout l’immeuble est rare mais les étages sont desservis par le gaz et l’électricité. Une solution esthétique consiste à utiliser des murs rayonnants électriques ; le principe est le même que pour les plafonds ou les planchers, une nappe chauffante étant noyée derrière une couche d’enduit. Le chauffage central au gaz est une solution classique, radiateurs dans chaque pièce et chaudière à condensation.
Côté Culture
Histoire et géographie
L’Histoire retiendra le nom de deux Préfets exceptionnels de Paris : Georges Eugène Haussmann, de 1853 à 1870, et Eugène Poubelle, de 1883 à 1896. Le préfet Poubelle a beaucoup œuvré pour la salubrité des rues de la capitale. Pour l’anecdote, son arrêté imposant des seaux à ordures prévoyait déjà le tri sélectif. Il est aussi à l’origine du développement du tout-à-l’égout dans Paris. Quant au préfet Haussmann, il a donné à Paris sa physionomie actuelle.