Maisons Berrichonnes

Couvrant le Cher et l’Indre, ce pays rural abrite un florilège de terroirs : Brenne, Champagne berrichonne, Sancerrois… Les maisons du Berry dépendent de la pratique agricole et de la hiérarchie sociale.

Style

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Sobre dans ses formes, l’habitat, emprunt d’une économie de moyens, livre une diversité de styles. Dispersé en fermes, logis paysans, grands domaines ou groupé en villages, le bâti reflète les pratiques agricoles (céréales, élevage, viticulture…), comme la hiérarchie sociale (journaliers, métayers, grands propriétaires)…

le nuancier berry

Côté Architecture

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Maisons de vignerons

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Sur les collines du Sancerrois, l’habitat se groupe en hameaux et villages serrés aux pieds des vignes. La maison de vigneron est souvent bâtie sur cave, lieu de travail et de transactions commerciales. Elle s’adapte à la pente et s’ouvre sur la rue par quelques marches qui la surélèvent et libèrent un peu plus d’espace pour la cave. L’habitation se compose souvent d’une seule pièce de 5 à 6 m de large, coiffée par un grenier. Un four à pain s’adosse à l’un des pignons. Parfois, un cellier jouxte l’habitation lorsque le sol calcaire ne permettait pas de creuser la cave. L’influence bourguignonne y est sensible surtout au niveau des toits à deux pans couverts de tuiles plates.

Locatures dans le Bocage

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À côté des hameaux et des villages, on rencontre des petites fermes isolées appelées « locatures ». Exploitations agricoles jadis louées en métayage ou en fermage par les grands domaines seigneuriaux, elles abritent sous un même toit grange, étable et habitation. Après la Révolution, ces « fermes-bloc » évoluent. Habitation, grange et écurie sont dissociées et disposées dans le prolongement l’une de l’autre ou en L. Parfois se rencontre un puits, un four à pain voire une boulangerie (avec pétrin, paniers et un four). Les matériaux sont le calcaire, le grès ferrugineux et le schiste tandis que les couvertures de chaume ont laissé place à la tuile plate au XIXe siècle. Galbée, cette tuile possède des teintes qui varient de l’orangé au brun.

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Les bons maçons rassurent les propriétaires sur les murs penchés, de forme "pyramidale" et refusent en général de redresser ce qui n’en a pas besoin.

Côté Rénovation

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1. Grands principes

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Au pied d’un mur en pyramide
Si des reprises de maçonnerie sont nécessaires, utilisez les mêmes matériaux (calcaire, grès rouge… de récupération) avec un mortier de chaux souple (pas de ciment). Tenez compte des appareillages locaux, souvent formés de deux parements assises à joints décalés afin d’éviter la présence de « coups de sabre » (superposition de joints verticaux). Entre les deux parements prend place un remplissage (ou « blocage ») de moellons, pierres des champs… De temps à autre, des pierres traversantes (boutisses), solidarisent les deux parements. Parfois, les murs sont plus larges à la base qu’au sommet. Cette forme « pyramidale » (ou fruit), conforte les maçonneries pour supporter planchers et charpente. Les bons maçons rassurent les propriétaires sur ces murs penchés et refusent en général de redresser ce qui n’en a pas besoin.

Des couleurs tout en douceur
Préférez aux peintures « tons bois » ou « bord de mer » (bleu breton, rouge basco-landais…), les peintures aux teintes douces en rapport avec la palette des matériaux traditionnels (blanc crémeux, gris, bleu-gris, vert pâle, ou, plus récemment, rouge « sang de bœuf » et « bleu charrette »). En général, les portes pleines sont formées de planches de chêne verticales, horizontales ou croisées assemblées à rainures et languettes. En intérieur, elles sont réunies par des barres horizontales articulées par des pentures en fer forgé posées sur gonds. En cas de remplacement, on peut choisir une porte vitrée en partie haute (4 carreaux), pour gagner de la clarté.

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2. Les ouvertures

Plus de clarté sans altérer
Souvent, les ouvertures sont situées sur la façade sud, la mieux exposée. Rares, de petites dimensions, disposées de manière aléatoire, elles contribuent à l’équilibre de l’habitat. Si vous créez de nouvelles baies pour gagner de la luminosité, ne modifiez pas ce rapport entre les « pleins » et les « vides ». Respecter les proportions des baies ne signifie pas toutefois vivre dans la pénombre. Ainsi une porte de grange peut volontiers laisser place à une menuiserie formée de trois châssis de même largeur : au centre, une porte ouvrant à la française encadrée de deux châssis fixes double vitrage. Au-dessus, ce « triptyque » vitré est couronné d’un châssis central à soufflet (pour l’aération), bordé de deux châssis fixes. Pour l’occulter, l’astuce consiste à recycler le ou les battants d’origine de la grange que l’on monte (après restauration), sur un rail coulissant fixé sur la façade (via des roulements à galets).

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3. Les toitures

Toiture au sommet
En cas de réfection du toit, préférez la tuile plate artisanale et préservez les coyaux (pièces de bois en sifflet placées à la base de la charpente pour relever l’égout du toit et éloigner l’eau de pluie des murs). Traditionnellement, les tuiles de rive des pignons débordent légèrement pour protéger ces derniers. Elles sont scellées, en laissant la tranche des tuiles visibles, pour éviter que le vent ne s’engouffre sous le toit. Veillez à ne pas coffrer leurs bords avec un solin de mortier (le résultat est peu esthétique et le chevron-support risque de pourrir). De même n’utilisez pas de tuiles de rive à « rabat », trop lourdes et inesthétiques. Le raccordement et l’étanchéité des arêtiers sont assurés par des solins de mortier formant une arête à la jonction des tuiles ou par une succession de tuiles scellées en recouvrement. L’emploi de tuiles creuses pour les arêtiers est déconseillé car elles banalisent les toits. Le faîtage est réalisé avec des tuiles creuses posées côte à côte (sans recouvrement), l’étanchéité étant assurée par des boudins de mortier formant des crêtes (les « pigeons »), reliées par des joints horizontaux (les « embarrures »).

Symboles célestes
Les toits à croupes (à quatre pans), s’ornent parfois d’épis de faîtage qui protègent les extrémités des poinçons de la charpente. Simple pot de terre cuite retourné ou ornements de coqs ou d’oiseaux encadrés d’anses, ils jouaient un rôle décoratif et symbolique qu’il convient de protéger. En bois ou en pierres de taille, les lucarnes-portes (pour hisser le foin ou le grain), sont fréquentes. Inscrites entre le mur de façade et le toit, elles sont coiffées d’un toit à deux ou trois pans. Les côtés des lucarnes (les « jouées »), sont habillés de tuiles ou de planches.

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Attention ! Si votre plancher est nivelé par une couche de plâtre, de briques ou d’argile, prenez garde de ne pas l’évacuer.

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4. S'agrandir ?

Combles à aménager
Combles à aménager : Illustration Adobe Stock
Gagner de l’espace, les solutions appropriées
Pour augmenter la surface habitable (ou créer par exemple un garage), faites bâtir des extensions comme autant de nouveaux modules s’inspirant de la volumétrie existante. Un appentis élevé dans le prolongement d’un pignon de Berrichonne offre une solution d’agrandissement pertinente. Autre solution fréquente, l’aménagement des combles dont les charpentes – souvent conçues avec un entrait retroussé dans le Berry qui n’entrave pas l’espace – ne nécessitent pas de modifications. Imparfaitement plan, le sol ou le plancher existant demande souvent une mise à niveau. Les planchers « à la française » (cloués sur poutres et solives), dont les lames sont disjointes, gagnent à recevoir une chape sèche isolante. Légère, propre et résistante, elle est formée de granules (billes d’argile expansée, perlite…), que l’on égalise en faisant glisser une grande règle sur des guides mis à niveau (ragréage sec), avant de les recouvrir de plaques de sol comprimées à haute pression (gypse et cellulose à bords feuillurés, plâtre haute dureté, panneaux CTB-H de 22 mm d’épaisseur ou d’OSB à rainures et languettes). Au préalable, des bandes résilientes, un non tissé ou un pare-vapeur sont interposés. Ainsi le plancher devient stable et silencieux. Attention ! Si votre plancher est nivelé par une couche de plâtre, de briques ou d’argile, prenez garde de ne pas l’évacuer. En le délestant de cette charge, vous risquez de créer un phénomène de rebond et de courbure des poutres. Si vous devez ôter cette couche de matériaux, procédez par travées et remplacez-les dans la foulée par une chape de mortier de chaux, une dalle de chanvre ou de béton léger.

Côté Culture

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Histoire et géographie

C’est la seconde plus ancienne province après l’Île-de-France. Rattaché au royaume en 1101, le Berry doit son nom aux « Bituriges », un peuple celte vaincu par Jules César. Achetée en 1100 par Philippe Ier (roi de France de 1060 à 1108), Bourges devient l’une des premières villes du royaume. Erigé en duché, le Berry échoit en 1418 au futur Charles VII qui en fait le centre de résistance des Valois contre les Anglais au cours de la guerre de Cent Ans.

Riches domaines céréaliers

Occupant le cœur du Berry, la Champagne berrichonne, un vaste plateau, est vouée aux cultures céréalières. C’est le second grenier à blé français après la Beauce. Dispersées sur les plateaux, les grandes fermes sont des domaines à cour fermée autour de laquelle se dressent de longs corps de bâtiments tels la grange (assez vaste pour qu’on y fasse les battages l’hiver), l’étable, la bergerie, le logis des ouvriers agricoles et la maison du maître. Parfois, un colombier (signe de richesse, source de mets et d’engrais), et une chapelle complètent l’ensemble. Environnées d’une basse-cour et de jardins potagers, ces exploitations abritaient une domesticité nombreuse (valets, palefreniers, charretiers, bergers). Beaucoup appartenaient à des grands propriétaires citadins (aristocrates ou bourgeois).

Quiétude et harmonie en Brenne

Au seuil du Poitou se découvre la Brenne. Son architecture est liée à l’exploitation des ressources et à la géologie locale (grès rouge, calcaire, argile…). Les bourgs s’étirent le long de petites rues tandis que les hameaux serrent leurs maisons pour mieux préserver l’espace agricole. Cette continuité est accentuée par la présence de murets de pierres qui ferment les propriétés. Le module de base de l’habitat est un volume rectangulaire. Simple, fonctionnel et extensible en longueur, ce module est reproduit lors des périodes fastes et lorsque la famille s’agrandit ! Un appentis s’accole souvent au mur pignon de l’habitation. Sorte de « placard extérieur », il abrite les fonctions liées à la vie quotidienne : four à pain, crèches (mangeoires) à moutons ou à cochons, poulaillers, clapiers...