Côté mer et côté vigne… Charente et Charente-Maritime se partagent un même fleuve, mais ont des caractères bien différents. Les maisons aussi.
Styles
Saintongeaises, charentaises, charentaises de bord de mer, les styles varient de maisons longues en maisons à étages avec logis sur l’étable.
le nuancier de charentes
Côté Architecture
Masures au sol en terre battue…
Avec leurs pierres blanches coiffées de tuiles canal, les maisons charentaises cultivent déjà un air méridional. Mais suivant la géologie, les ressources locales et la condition sociale, elles montrent des visages bien différenciés. Confiée à des paysans sans terre en échange du partage des récoltes, la maison de métayer est l’habitat de base. Souvent dotée d’un étage desservi par un escalier extérieur protégé par un auvent (ou « balet »), elle s’ouvre sur un rez-de-chaussée en terre battue jadis occupé… par l’étable. Au-dessus, la pièce à vivre se tourne vers la cheminée, premier « meuble » de la maison. Deux à trois fenêtres et une porte l’ajourent. Réunissant sous le même toit l’habitation et l’exploitation agricole, la longère accueillait souvent plusieurs familles. Modeste mais fonctionnelle, cette ferme-bloc linéaire (15 à 20 m environ) délimite une cour, prolongement à ciel ouvert de l’exploitation. La façade (orientée sud ou sud-est), et ses ouvertures révèlent les fonctions intérieures (étable, pièce à vivre, cuisine).
Confiée à des paysans sans terre en échange du partage des récoltes, la maison de métayer est l’habitat de base.
...Et grands domaines viticoles
Dans les environs de Cognac, l’habitat se disperse en propriétés viticoles à cour fermée. Il est souvent né de l’ajout successif de dépendances autour d’un bâtiment d’origine. Vers 1850, à la faveur de l’essor des eaux-de-vie, se sont accolés de part et d’autre de l’habitation, un chai, une écurie et une charretterie ajourée grâce à des piliers qui délimitent une cour. Un mur de clos, voire d’enceinte, les relie formant un îlot intime. On y accède par un grand portail, parfois orné de pilastres et de chapiteaux (ioniques, doriques…), coiffé d’une corniche. Porte charretière en plein cintre et porte piétonne permettent d’y accéder. Dans leur perspective se découvre le logis du maître aux façades à un étage bien ordonnancées et percées de fenêtres symétriques et alignées. Elles sont enduites à la chaux pour souligner les encadrements en pierres de taille et les détails d’architecture.
Admirée mais cachée
Dressée au centre de la façade, la porte ornée de moulures s’ouvre sur un couloir (corridor), qui dessert la cuisine, les pièces latérales puis la salle commune dotée d’une grande cheminée. Un escalier en chêne mène à l’étage dévolu aux chambres puis au grenier où l’on remisait grains, semences, légumes secs… Résidence d’un propriétaire aisé (agricole ou viticole) ou d’un notable, la maison de maître se rencontre tantôt dans le centre du village tantôt isolée. D’une facture élégante, elle se veut admirée pour son opulence mais à l’abri des regards indiscrets ! Implantée en recul de la rue et précédée d’une cour avec jardin, elle dresse un corps de bâtiment souvent flanqué de deux ailes. Formée de trois ou cinq travées symétriques, elle bénéficie d’une double orientation ajourée de nombreuses baies et lucarnes bien alignées. Un enduit plâtre et chaux simule parfois un appareillage riche en modénature (bandeaux, pilastres, plate-bande…).
Côté Rénovation
Dans les Charentes, les toitures reçoivent des tuiles canal qui annoncent le Midi. Côté mur, c’est pierre de taille ou moellons, et souvent des enduits pour protéger des intempéries. En effet si ça sent le Sud, cela reste quand même une région sensiblement exposée.
1. Les ouvertures
Porte ouverte sur les baies
Élément premier de lecture, de rythme et d’esthétique des façades charentaises, les fenêtres, volets et portes sont très souvent l’objet de modifications. On s’attachera à maintenir l’ordonnancement et la qualité de mise en œuvre des maisons, qu’elles soient modestes ou de noble facture. Les menuiseries en bois peint sont dotées de 2, 3 voire 4 carreaux par vantail selon la hauteur de l’ouverture et la volumétrie de la maison. Elles sont souvent posées en retrait du nu extérieur du mur, permettant un ébrasement intérieur garant d’une bonne diffusion de la lumière. Peints de tonalités claires et nuancées (blanc, beige, gris, bleu, vert pâle…), les volets pleins à lames verticales sont dotés de pentures ou barres hautes et basses (sans écharpe). Sur les maisons de ville et demeures de maître, ils peuvent être persiennés. Premier regard sur la maison, la porte d’entrée se décline en divers styles : pleine à lames, à cadres moulurés en soubassement, vitrée en partie haute, à un ou deux vantaux couronnés d’une imposte vitrée, à quatre panneaux diamantés surmontés d’impostes à croisillons de bois… Attention, les portes, les fenêtres et les volets en aluminium ou en PVC ainsi que les volets roulants, ne sont pas toujours du goût de l’Architecte des Bâtiments de France. Contactez-le ou consultez votre CAUE départemental pour obtenir un avis.
Les portes, les fenêtres et les volets en aluminium ou en PVC ainsi que les volets roulants, ne sont pas toujours du goût de l’Architecte des Bâtiments de France.
2. Les murs
Maçonneries et enduits
On trouve des moellons aux lits réguliers posés à sec ou maçonnés « à joints affleurants » lorsqu’ils sont de type « tout venant ». Ils sont réservés aux bâtiments d’exploitation, aux murs de clôture et parfois à certaines façades non exposées. Consolidez les maçonneries avec des moellons de récupération de même aspect, jointoyés au mortier de chaux. Les chaperons protégeant les murs de clôture sont de plusieurs types : pierres de taille plates ou bombées, tuiles canal scellées en pente avec saillie sur l’épaisseur du mur, moellons posés en pointe couverts d’un glacis à la chaux. Si les murs sont protégés par un enduit mince, ne pas les mettre à nu car le gel peut fissurer les pierres. Suivant son état de conservation, le refaire à l’identique ou le nettoyer à l’eau douce et à la brosse, avant de le protéger avec un badigeon de chaux.
La pierre de taille
Réservée aux belles bâtisses, elle souligne les encadrements des baies, forme bandeaux, chaînes d’angle et corniches qui se détachent légèrement de la surface de l’enduit. C’est un calcaire tendre à demi-ferme d’un blanc souvent lumineux appareillé à joints très minces sous forme de blocs massifs ou de parements doublés à l’intérieur du mur par un blocage de moellons. En cas de nettoyage, traitez-la avec douceur en proscrivant tout procédé agressif (sablage, nettoyeur haute pression, rabot…) qui fragilisera sa surface, ses arêtes et moulures éventuelles. Préférez des procédés doux (lavage par nébulisation, gommage, projection de microbilles de verre...). Si des pierres moulurées montrent des altérations de surface, tentez de les réparer avec un mortier spécial de ragréage.
3. Le toit
Couverture tout en rondeur !
Emblématique de la région, la tuile canal (dite « tige de botte »), est un demi-cylindre tronconique de terre cuite aux nuances ocrées (du rose clair à l’orangé foncé) qui annoncent le Midi. Posées tantôt dessous (tuiles de courant), tantôt dessus (tuiles de couvert), elles dessinent des caniveaux parallèles par lesquels s’écoule l’eau. À la base du toit, le premier rang déborde sur une génoise (faite d’une superposition de tuiles), ou une corniche en pierres de taille moulurées. Sur les pignons, les tuiles sont scellées au ras des rives. Grâce à ces dispositifs, la présence de gouttières n’est pas indispensable. En cas de rénovation, trois possibilités pour les tuiles s’offrent à vous : sur voliges ou liteaux (protégés d’un écran de sous-toiture), utiliser des tuiles de production industrielle « d’aspect vieilli » ou des tuiles de fabrication artisanale, ou encore de récupération. Comme ces dernières sont rares (et coûteuses), on peut les réserver aux éléments convexes (tuiles de dessus), les plus apparentes. Moins visibles, les éléments concaves (tuiles de dessous) qui assurent l’écoulement, peuvent s’accommoder de tuiles neuves. Ainsi, votre nouvelle toiture préservera sa patine.
Toiture et ouvertures
Faibles, les pentes des toits abritent des combles rarement habitables en l’état. D’où la rareté, voire l’absence de lucarnes, à l’exception des toitures en ardoise mansardées des demeures de maîtres. Parfois, la ventilation est assurée par des châssis vitrés de type « tabatière ». En cas d’aménagement, préférez retrousser les entraits de la charpente pour dégager du volume plutôt que de bouleverser la hauteur (et les proportions) du bâtiment. Si des ouvertures sont nécessaires (type fenêtres de toit), implantez-les de préférence sur les versants arrières, moins visibles du domaine public. Ces châssis devront être de petites dimensions et s’intégrer à l’épaisseur de la tuile. En général, mieux vaut aménager plusieurs petits châssis métalliques que de grandes fenêtres de toit.
Côté Culture
Histoire et géographie
La Charente, partagée entre labours et coteaux de vigne, doit son nom au fleuve qui la traverse, musardant de boucles en méandres sous de fraîches frondaisons. Sa voisine, maritime, est réputée pour sa luminosité et son climat.
Charente de l’intérieur et Charente du rivage
Rurale, nonchalante et riante : telle est la Charente ! Ses eaux pures ont permis la fabrication de papiers jadis réputés dans toute l’Europe. Placée sur une des routes de Saint-Jacques-de-Compostelle, elle connut un élan de foi inégalé, devenant un des hauts lieux de l’art roman. Elle doit sa prospérité au cognac, cet alcool qui est obtenu après une double distillation et un lent vieillissement en fûts de chêne, si prisé dans le monde entier. Ancien carrefour commercial et stratégique ponctué d’arsenaux et de ports prospères, sa voisine, la Charente-Maritime invite au dépaysement avec les maisons aux façades blanches tapies sous les roses trémières, les senteurs de myrte des landes de l’île de Ré, la douceur du climat, la luminosité de l’île d’Oléron prisée pour ses plages aux eaux adoucies par le Gulf Stream, ses bois de pins, de chênes et d’eucalyptus…