Maisons du Cantal

Hauts plateaux aux coulées basaltiques, pâtures des montagnes, collines de la Xaintrie et de la Châtaigneraie au charme déjà méridional… Façonné par la géologie et le pastoralisme, l’habitat original du Cantal, cette Auvergne du sud, en traduit l’histoire.

Styles

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La lauze est encore très utilisée pour les toitures des édifices patrimoniaux. L’ardoise couvre une bonne partie des toits des habitations. Le granit, le schiste et même le calcaire (dans le sud du département) habillent tous les murs des maisons.

LE NUANCIER DU CANTAL
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Côté Architecture

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Le châtaignier en viatique

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Typique de la Châtaigneraie, le « sécadou » (petit séchoir en granit ou en schiste) rappelle que la châtaigne a nourri des générations de Castagnaires. Décimé par la maladie de l’encre (vers 1890) et les défrichements, le châtaignier a été réhabilité. À l’abandon, les séchoirs retrouvent vie, aménagés en gîtes ou micro gîtes. Conséquence du relief et de l’indigence des terres, l’habitat se développe souvent en hauteur, superposant l’exploitation et l’habitation. Au rez-de-chaussée, cave, remise et étable abritaient les récoltes et quelques moutons. Accessible par un escalier extérieur, le logis prend place à l’étage et s’ouvre sur une galerie de bois (le « bolet ») couverte par un auvent (le plancadou). Le grenier servait au stockage du foin. Toutefois, à la fin du XIXe siècle, avec l’essor de l’élevage bovin et des cultures céréalières, ce type d’habitat a peu à peu laissé place à des maisons indépendantes des bâtiments agricoles.

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La ferme « bloc à terre » est un bâtiment rectangulaire (8 à 10 mètres de long), qui abrite le logis et la grange-étable qui peut s’étirer sur 60 mètres !

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Opulentes fermes planézardes

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Née des coulées basaltiques du volcan cantalien, la Planèze de Saint-Flour occupe un vaste plateau incliné dont les terres fertiles lui ont valu le surnom de « Beauce du Cantal », mais situé à mille mètres d’altitude, battu par les vents et couvert de neige l’hiver ! Au XIXe siècle, les cultures céréalières laissent place à de vastes pâtures pour l’élevage laitier. La ferme « bloc à terre » est un bâtiment rectangulaire (8 à 10 mètres de long), qui abrite le logis et la grange-étable qui peut s’étirer sur 60 mètres ! Initialement de plain-pied (le rez-de-chaussée regroupait la salle commune et les chambres), l’habitation gagne au XIXe siècle un étage destiné aux chambres, ce qui entraîne une différenciation des toitures. Proche dans la conception, la ferme planézarde se distingue par son logis conçu sur deux étages (dont l’un sous le comble). L’habitation se détache ainsi de l’exploitation par sa façade plus élevée, ajourée de fenêtres symétriques, et sa toiture à deux pans (avec ou sans croupes), de laquelle émergent en gradins de hautes souches de cheminée. Sa porte est souvent soignée avec un encadrement de pierres de taille, couronné d’un entablement souligné d’une corniche sculptée (nom du propriétaire, date de construction…). Le comble en surcroît est ajouré de baies en attique qui rendent inutile la présence de lucarne. Dotée de pièces distinctes (salle commune, chambres, cuisine…), elle traduit l’enrichissement de la paysannerie avec l’essor de l’élevage. Quant à la toiture, elle est couverte de lauzes de schiste aux teintes argentées taillées en écaille et couronnées de « clouques », des tuiles faîtières creusées dans le tuf volcanique.

Granges de luxe

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Typique des zones montagneuses, la grange-étable est une construction dont le volume de la charpente ne manque pas d’impressionner ! Epais, mais de faible hauteur, les murs portent une charpente « à chevrons formant ferme » qui évoque une coque de bateau renversée. Il s’agit de fermes à entraits retroussés longues, très rapprochées (tous les 60 à 80 cm), et très pentues (80°), qui semblent parfois descendre jusqu’à terre ! Contreventé par un voligeage continu, ce type de grange permettait de dégager à bon compte un volume digne d’une cathédrale pour stocker les fourrages durant les longs frimas. Parfois précédée d’un pigeonnier-porche porté par de solides piliers, elle abrite deux niveaux. En bas prend place l’étable où logeait le troupeau l’hiver, tandis que l’étage abrite un copieux garde-manger ! Certaines sont accessibles de plain-pied tandis que d’autres présentent une rampe formée par une levée de terre adossée à la façade («montade» ou «mounti») par où on conduisait les bêtes. Infiltrations, pourrissement des voliges et des appuis des chevrons, fléchissement dû à une surcharge, désassemblage de l’entrait… Ces dégradations sont souvent dues au manque d’entretien des charpentes et aux problèmes d’étanchéité de la couverture qui laissent s’infiltrer l’eau. Pour imposante qu’elle soit, cette charpente n’est pas très difficile à rénover ! En effet, sa conception ne nécessite pas de la démonter en totalité, mais seulement la zone où les chevrons sont abîmés. Les pièces abîmées sont éliminées, les fermes consolidées ou refaites à l’identique si nécessaire.

Le cantou, siège de la maisonnée

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Dans tous les cas, l’habitation abrite une cheminée (le cantou) encastrée dans l’un des pignons et couronnée d’un grand arc. Premier «meuble» de la maison, elle cumule des fonctions essentielles : on l’utilise pour se chauffer et s’éclairer mais aussi comme cadre de vie et d’échanges. Dans le foyer pend la crémaillère réglable ou lou cromal. Autour de l’âtre crépitant – à l’intérieur duquel plusieurs personnes peuvent prendre place sur des bancs –, on cuit les aliments, on devise sur les travaux du jour et on finit l’ouvrage en cours, le soir à la veillée. Souvent, l’âtre du cantou s’ouvre sur un four à pain construit dans le prolongement du pignon. Plus loin, dans une annexe voûtée se trouve la souillarde (ou aiguière) éclairée par un fenestron. L’évier en granit, dans lequel on faisait la vaisselle, est percé d’un trou pour l’écoulement des eaux usées.

Côté Rénovation

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Ferme de montagne, grange-étable… le bois est souvent présent dans l’habitat sous forme de boiseries, mobilier, plancher à poutres et solives. Une tradition que vous pouvez remettre au goût du jour avec avantage. Chaleureux, naturel, isolant, simple à mettre en œuvre et d’un coût abordable, le bois peut être utilisé pour presque toutes les parties de la maison : cloisons, plancher, plans de cuisine ou de toilette, portes à panneaux menuisés. Murs et toiture sont le domaine de la pierre.

1. Le toit

Moins de bruit là-haut !
Bruyants, les séculaires planchers à poutres et solives des fermes du Cantal peuvent être consolidés et isolés phoniquement en coulant une chape de béton léger à base de granulés de bois minéralisé, billes de polystyrène, granules d’argile expansé, fibres de chanvre… Elle se dresse sur un plancher en panneaux OSB (rainurés-languettés), une sous-couche isolante (type fibre de verre contrecollée sur feutre bitumeux), voire des panneaux de laine minérale rigide qui atténuent les bruits d’impact ou des plaques moulées en polystyrène expansé de forte densité à bords rainurés bouvetés. Attention toutefois, car leur épaisseur (1,5, 2, 3 cm…), réduit la hauteur des pièces. Moins résistant mécaniquement que le gravier, le granulé de bois minéralisé offre cependant des qualités appréciables : il est isolant, microporeux et, formulé en dalles, il est deux à quatre fois plus léger qu’une dalle béton classique avec graviers (50 kg/ m2, soit de 800 à 1 000 kg/m3 contre 2 000 kg/m3 environ). Après séchage, on recouvre la chape d’une nouvelle couche de panneaux OSB avant la pose d’un revêtement de sol (parquet à lames larges, jonc de mer, sisal).

Toiture 100 % minérale
Les toits de « lauzes » – dalles de schiste cristallin ou de trachyphonolithe – taillés en écaille sont l’un des symboles de l’habitat auvergnat. Si une rénovation s’impose, faites appel à un artisan lauzier qui lui redonnera tout son lustre. Épaisses de 1 à 3 cm, les dalles (issues de récupération et retaillées avec soins), peuvent être posées sur un nouveau voligeage (planches de coffrage), après dépose de l’ancien. Si son état est correct, conservez ce plancher (souvent en châtaignier), pour garder son aspect patiné côté comble marqué par les chevilles de fixation en chêne des anciennes lauzes. Faire poser un nouveau voligeage afin de créer un double et solide platelage permet d’insérer un isolant « pris en sandwich » pour laisser les chevrons de la charpente apparents. Les lauzes sont clouées sur un écran de sous toiture (env. 45/m2, soit un poids de 90 à 110 Kg/m2). Pour que l’eau de pluie ruisselle sans infiltration, elles sont posées en ordre de taille décroissant et à joints décalés. Ainsi, les lauzes de l’égout (bas du toit), sont-elles plus longues et larges que celles du faîtage. Points sensibles de la couverture, les rives et arêtiers sont traités avec de grandes dalles rectangulaires à bords biseautés qui laissent un aspect nervuré très graphique. Ces dernières sont couvertes de « tuiles » faîtières taillées dans le tuf (les « clouques »), ou parfois imbriquées via des encoches latérales tel un faîtage en lignolet (dit en « rastel »).

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L’aménagement des combles exige trois conditions : disposer d’un plancher porteur, le renforcer ou le créer, et d’un éclairage naturel diffusé des lucarnes de style régional.

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2. Lucarnes

Lucarnes, le charme au sommet
Incontournable de la rénovation et de l’extension de la maison, l’aménagement des combles exige trois conditions : disposer d’un plancher porteur, le renforcer ou le créer, et d’un éclairage naturel diffusé des lucarnes de style régional. Lucarnes-portes, « à capucine », « en bâtière » ou « à chevalet »… Qu’elles éclairent, ventilent ou donnent accès au grenier, toutes apportent une note de caractère et d’équilibre aux imposantes toitures qu’elles rythment ! Œuvre de charpentier ou de maçon et de couvreur, elles sont tantôt alignées sur les ouvertures de la façade, tantôt disposées avec symétrie. Fréquente, la lucarne à capucine (ou à croupe), est couverte d’un toit à trois pentes. Ses joues sont habillées de lauzes, d’ardoises ou de tuiles dans les régions méridionales. Celle en bâtière montre un toit à deux pentes parfois accentuées. Le cadre de la baie est surmonté d’un pignon triangulaire en pierres taillées. Rampante, elle est couverte d’un long et étroit chapeau à pente unique orienté dans le sens de l’inclinaison du toit. De très petites dimensions, elle s’aligne parfois en deux rangées successives pour accroître l’aération du comble. La lucarne-porte (dite « fenière ») rappelle que cet ouvrage était jadis moins conçu comme source de lumière que comme accès aux combles pour y remiser fourrages, grains… Aussi est-elle bâtie en partie basse du toit sur l’épaisseur des murs gouttereaux. Sur les granges-étables, il n’est pas rare qu’elle se situe à l’arrière pour profiter du dénivelé du terrain et offrir un accès direct au fenil. Si vous désirez créer une lucarne, inspirez-vous de ces modèles, matériaux et proportions compris ! Vous pouvez aussi ajourer une lucarne-porte grâce à une porte-fenêtre.

Restez dans le style !
Une lucarne se compose de trois parties : un cadre de bois assemblé à tenons mortaises chevillés ou des jambages en pierres de taille couronnés d’un linteau où prend place la baie ; des pans latéraux (« joues » ou « jouées ») et enfin le toit, petite charpente appelée « chapeau ». En cas de rénovation, portez votre choix sur une menuiserie en chêne double vitrage adapté aux performances recherchées (isolation thermique ou solaire renforcée). Formées de cadres de bois épousant la pente du toit, les joues sont habillées du même matériau que la couverture (lauze, ardoise…). Notez qu’une lucarne implantée en façade arrière (peu visible) peut recevoir des châssis fixes double vitrage qui apportent un surplus de lumière appréciable. En cas de création « à l’identique » ou « dans le style », sachez que l’implantation d’une lucarne (d’un poids variant de 150 à 500 kg), réclame des précautions. Elle impose l’ouverture d’un « chevêtre » renforcé par un contre-chevronnage de chaque côté et sous l’appui de fenêtre – sauf si ce dernier repose sur la maçonnerie de la façade. Positionnée en pied de pente et exposée aux eaux de ruissellement, l’étanchéité doit être soignée ! Les « noues » (intersections des versants du « chapeau » avec la toiture), le faîtage, l’appui sur façade et les joues seront protégés par une mise en œuvre spécifique (telles des noues arrondies), des plaques de zinc et autres produits d’étanchéité (bavette, bande d’étanchéité, solin). Enfin, l’isolation intérieure du bâti est impérative pour éviter les fuites thermiques.

Côté Culture

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Histoire et géographie

Le volcan du Cantal est occupé par l’homme depuis fort longtemps. A l’époque romaine, les Arvernes, sont parmi les plus anciens habitants des lieux. Aujourd’hui, le Cantal est une terre de randonnée et de tourisme vert. Ce qui n’exclut en rien l’agriculture, spécialement lorsqu’une partie de l’exploitation a été transformée en gîte rural.

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Nature sauvage et douce

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Vertes estives à l’évocation alpestre, forêts majestueuses, force des Monts du Cantal… À la croisée du Midi, du Languedoc et du Limousin, le Cantal offre un concentré grandiose de géologie. Cœur de la Haute-Auvergne, les monts du Cantal reposent sur le plus vaste édifice volcanique d’Europe. Nés des colères de la Terre, il y a onze millions d’années, ils délimitent un territoire en forme de cercle de 70 km de diamètre et 2 700 km2 de surface ! Vus d’en haut, les sommets du Cantal dessinent une immense étoile dont les branches abritent autant de vallées profondes et de cirques grandioses. À la tête de ce « toit de l’Auvergne », se dresse le Plomb du Cantal (1 858 mètres) qui livre de beaux panoramas jusqu’à la chaîne des Puys, les Alpes, voire les Pyrénées. Alentour, telles des pyramides aux sommets rabotés, les puys Mary (1 787 mètres), Griou, Violent, de Chavaroche… Longtemps enclavé par ce relief, c’est un pays rude et soumis à des climats très contrastés. Tout naturel qu’ils puissent paraître, les paysages sont en réalité domestiqués. Pour développer l’élevage, les hommes ont défriché les versants, dressé des murs de soutènement, bâti des burons… Reflet de cet agro-pastoralisme, l’habitat, conçu en hauteur ou en longueur, associant ou dissociant les fonctions d’exploitation et d’habitation, est un livre d’architecture à ciel ouvert.