La Corse se découvre au rythme de ses routes étroites et perchées qui décrivent de longs lacets sous les ramures des chênes verts et châtaigniers. Villages-sentinelles juchés sur leurs pitons rocheux, côtes échancrées, plages de sable rose, calanques plongeant leurs falaises de granit rose dans la mer… s’offrent aux randonneurs, amateurs de patrimoine, baigneurs… comme autant de havres ! Comme sur les îles de l’Atlantique, ses habitants tournèrent longtemps le dos à la mer, source d’invasions et de razzias, préférant pratiquer l’élevage et l’agriculture.
Styles
Le contraste est saisissant entre les villages côtiers, façonnés par le brassage des cultures des dominations passées, et le centre de l’île, habitué depuis toujours à se débrouiller avec les moyens du bord, sans espérer, ni solliciter, l’aide de quiconque pour cultiver un véritable art de vivre.
le nuancier de corse
De cette économie vivrière corse est née un riche patrimoine de baracconi (abris de pierres sèches), bergeries, fours à pain…
Côté architecture
Fucone, bergeries, fours à pain…
Suivant qu’ils veulent échapper aux convoitises des bandes armées, créer un point de passage sur un parcours de transhumance ou rester invisibles depuis la mer, les villages campent crêtes, promontoires ou creux de vallée. Creuset de l’âme corse, ils se gravissent au rythme de ruelles empierrées (les stretti), que dominent des passages couverts reliant deux à deux les bâtisses, hautes et étroites aux allures de maisons-fortes, pour économiser le terrain et s’abriter de la canicule. Espace de rencontres, la fontaine honore l’eau précieuse sous une voûte ou dans un petit édifice. En Castagniccia, le fucone (ou foyer), a longtemps formé le centre de la vie familiale, invitant aux récits et aux chants. Situé au centre de la pièce principale, il servait aussi bien à chauffer la maison et cuire les aliments que sécher et fumer les charcuteries. Les Corses ont longtemps vécu en autarcie, cherchant à exploiter au mieux terres, rivières et forêts. De cette économie vivrière est née un riche patrimoine de baracconi (abris de pierres sèches), bergeries, fours à pain… Utilisés pour moudre et broyer froment, châtaignes et olives, les moulins à eau sont implantés dans le creux des vallées, enjambant un ruisseau ou un torrent. Jusqu’au XIXe siècle, produire son pain, c’était vivre ! Préparé avec de la farine de blé ou de châtaigne, cet aliment de base nécessitait une cuisson dans un four tantôt appuyé contre l’un des murs de la maison tantôt bâti en lisière du village pour prévenir les risques d’incendie. Dans le désert des Agriates (pays du Nebbio), subsistent des paillers, bergeries aux toits arrondis couverts de branchages et de glaise
Côté Culture
Histoire et géographie
Le nom de l’île de Beauté aurait pour origine plusieurs… origines. Corso, un des fils d’Hercule, redonne quelque prestige à l’île dont Strabon, géographe grec, disait qu’elle était affreuse à habiter. Le mot grec kallistè (la très belle) a longtemps donné à l’île sa beauté. Cependant que Cyrnos, un autre fils d’Hercule, est l’étymologie la plus vraisemblable. Quoique… un certain Corso, neveu d’Enée (fondateur de Lavinium, future Rome) rattache la Corse au passé prestigieux des Romains et des Grecs (Enée était fils de la déesse Aphrodite et d’un mortel troyen). Une sacrée généalogie !
Un solide caractère !
Depuis 2 000 ans, la Corse a connu près de 20 régimes politiques, 40 révoltes et 7 périodes d’anarchie. Toujours conquise mais jamais intégrée, elle s’est forgée un solide caractère d’indépendance ! Succédant à la présence gréco-romaine, les républiques commerciales de Pise et de Gênes s’affrontèrent pour sa possession, lui léguant, certes, une agriculture prospère et un riche patrimoine, mais qui profitait surtout à l’aristocratie italienne. En 1729 éclate une révolte contre Gênes, qui donne le signal des guerres de libération. Élu « Général de la nation corse », Pascal Paoli proclame un gouvernement national et donne à l’île des institutions politiques d’inspiration rousseauiste. Mais faute de bases économiques et sociales, ce régime fut écrasé et la Corse rachetée à Gênes par la France en 1768.
Au XIXe siècle, poussés par la misère, des Cap-Corsins émigrèrent vers les Amériques, où ils firent souche, revenant parfois, fortune faite, s’y faire construire des Palazzi.
Les Palazzi du cap corse
Dominant le large, un chapelet de 30 tours de guet et de défense se dresse en vigie face aux envahisseurs redoutés. Construites entre le XVe et le XVIIe siècles, ces tours génoises faisaient partie d’un système défensif comptant 91 tours qui couvraient tout le littoral ! Dès qu’une voile ennemie pointait à l’horizon, un feu était allumé, relayé par les gardiens des autres tours, mettant ainsi l’île en alerte ! Pourtant, la région du Cap Corse est la seule qui ait suscité des vocations de pêcheurs et d’armateurs. Le Cap Corse avance sa pointe vers le nord, regardant Gênes, profitant d’une vaste surface côtière et de fonds marins peu profonds. Prenant le large pour vendre vins, huile d’olive, châtaignes, céréales, miel… ses habitants achetaient les produits manufacturés dont ils avaient besoin. Au XIXe siècle, poussés par la misère, des Cap-Corsins émigrèrent vers les Amériques (les Antilles, Porto Rico, Saint-Domingue…), où ils firent souche, revenant parfois, fortune faite, s’y faire construire des Palazzi, ces demeures qui disent leur désir de paraître, et tranchent avec l’austérité de l’architecture traditionnelle. Isolées au milieu de jardins, elles élèvent sans complexe de beaux volumes sous plafonds décorés et sont ajourées de fenêtres bien alignées protégées par des volets « à jalousie ».