Qui dit traitement des déchets dit recyclage ! Le tri et la collecte des déchets de chantier de rénovation sont les premiers maillons d’une longue chaîne. Les matériaux collectés sont voués à être traités, transformés en nouvelles matières premières pour refabriquer de nouveaux matériaux ou produits. Pour un chantier de rénovation, le traitement des déchets doit être organisé en amont, c’est une obligation. Si personne n’est propriétaire des déchets de rénovation, le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre en sont responsables !
Déchets sans propriétaire
Ce n’est pas une simple paille. Selon le ministère de l’Ecologie, les activités du bâtiment et des travaux publics génèrent près des ¾ des déchets produits en France. La rénovation c’est le diable côté environnement. Il faut donc s’attaquer à la montagne. Tous les acteurs sont concernés et ce commandement est déjà respecté par les pros.
Le donneur d’ordre, le propriétaire, dès la signature du devis doit se renseigner sur le devenir des déchets du chantier de rénovation qu’il confie à un professionnel. En effet, le maître d’ouvrage est considéré comme le producteur des déchets et le responsable de leur bonne gestion jusqu’à leur destination finale (réemploi, incorporation, valorisation, élimination, …). Le professionnel en est seulement le détenteur durant le chantier et, par « délégation », chargé de les gérer. Il faut également noter qu’un déchet, quel qu’il soit, n’a pas de «propriétaire». Il s’agit donc d’une responsabilité partagée qui va demander beaucoup de jurisprudence pour être clairement définie. Dans l’attente, il est prudent, pour le maître d’ouvrage, de faire mentionner le devenir des déchets dès l’établissement des devis – c’est obligatoire depuis le 1er juillet 2021 - et, pour le maître d’œuvre, de pouvoir justifier de leur traitement dans une filière autorisée.
Les déchets inertes sont les plus nombreux (près des ¾). Ils sont définis comme des déchets minéraux. Ils ne sont pas dégradables et ne se décomposent pas.
Le podium des déchets de chantier
Il existe trois catégories de déchets de chantier du bâtiment qui représentent 46 millions de tonnes par an. Il faut noter que cette classification diffère de celle établie au niveau européen pour «toute substance ou objet dont le détenteur se défait».
- Les déchets inertes sont les plus nombreux (près des ¾). Ils sont définis comme des déchets minéraux qui conservent leurs caractéristiques physico-chimiques, même s’ils sont stockés. Ils ne sont donc pas dégradables et ne se décomposent pas. La liste est longue et concerne la terre, le béton, les gravats, le verre, les pierres, etc.
- La distinction avec les déchets non inertes n’est pas toujours évidente. Car ces derniers sont définis en opposition aux premiers et représentent 1/5e des déchets. Ce sont des DIB Déchets Industriels Banals, qui n’explosent pas et ne corrodent pas mais qui peuvent vieillir et se transformer. Dans cette catégorie se rangent le bois, les plastiques, les métaux, le plâtre, les emballages, etc.
- Pour la dernière catégorie, c’est plus simple puisque les déchets dangereux contiennent des composés toxiques. Ils sont peu nombreux (moins de 5 %) mais sont compliqués à traiter. L’inventaire fait état des hydrocarbures, des huiles, des solvants, du plomb, de l’amiante, des PCB, des PCT, … Cela concerne aussi les déchets des deux catégories précédentes quand ils sont souillés, comme du bois de charpente traité par exemple.
Gestion des déchets de rénovation
A - Un peu d'organisation
Le traitement des déchets est donc à envisager dès la conception du projet. Il faut prévoir les moyens de tri, de valorisation sur le chantier lui-même et un espace de stockage. Pour le tri, par exemple, il faut plutôt envisager un démontage élément par élément plutôt qu’une démolition à la masse.
En pratique, la répartition des déchets s’effectuent en différents postes. C’est le tri dit «7 flux», même si, en réalité, il y en a plus : - Les produits minéraux inertes (première catégorie) hors plâtre - Les plastiques - Les métaux - Le verre - Les papiers, cartons, emballages non plastifiés - Le bois - Le plâtre.
Selon sa nature, un produit change de catégorie. Un isolant en laine de roche est un produit minéral, en polystyrène, c’est un plastique, en fibre de bois, il est considéré comme du carton.
A cela, et à part, s’ajoutent les déchets dangereux qui ne doivent pas être mélangés entre eux et doivent être stockés à l’abri. Enfin, l’amiante doit faire l’objet d’un traitement spécifique.
B - Un peu d'équipement
La prise en compte du traitement des déchets permet d’estimer leur volume et donc de prévoir le matériel nécessaire.
- La benne, en location, est indispensable pour les gros volumes. Une autorisation d’occupation du domaine public est nécessaire si elle doit être installée dans la rue. Le prix de la location varie selon le volume, la durée et le type de déchet.
- Le sac à gravats est pratique pour les petits chantiers ou des déchets en quantité limitée. Attention au poids, à la résistance du sac. Un big bag de 1000 litres impose un engin de manutention.
- Les fûts de déchets sont nécessaires pour les produits liquides, souvent classés dans les déchets dangereux.
C - Où porter les déchets ?
Une fois triés, s’ils ne sont pas valorisés sur place ou dans une filière particulière, il faut bien se débarrasser des déchets, ailleurs que dans un bosquet discret bien sûr.
- Il existe désormais des filières PMCB pour Produits et Matériaux du secteur du bâtiment. Dans le cadre de REP, Responsabilité Élargie du Producteur, une filière s’est mise en place. En gros le fabricant paye un éco-organisme et le distributeur participe à la récupération des déchets gratuitement. Idem pour la filière ABJ Brico Jardin pour les outils etc. Vous pouvez donc tenter d’aller chez votre distributeur de matériaux préféré sauf si c’est un trop petit point de vente. Sinon, pour des petits volumes, il est possible de les porter dans une déchèterie publique. C’est le cas pour un particulier.
- Un professionnel peut être amené à faire appel à un collecteur. C’est, par exemple, souvent le cas des loueurs de benne qui prennent en charge cette prestation.
D - Encore des déchets
Dans le cadre de la lutte contre les dépôts sauvages et depuis le 1er juillet 2021, ont été instaurés les bordereaux de dépôt pour les déchets inertes et non dangereux. De plus, toute entreprise de travaux produisant ou expédiant des déchets doit tenir un registre des «déchets sortants».
- Parallèlement, le destinataire, l’entreprise qui prend en charge les déchets, doit tenir un registre des déchets entrants. Entre les deux, le transporteur éventuel tient son propre registre.
Un autre registre est tenu par les négociants et les entreprises de courtage qui négocient les déchets. Enfin, ceux qui traitent les déchets «en vue de leur réutilisation, recyclage ou valorisation» (notion de sortie du statut de déchet) remplissent scrupuleusement un dernier registre.
- Le même arrêté (31 mai 2021) prévoir un traitement particulier et tout aussi précis aux terres excavées et aux sédiments. Ces documents doivent être conservés trois ans. Avant leur recyclage ?
E - Et le réemploi
Une fois bien triés, les déchets peuvent donc être réutilisés, soit en l’état, soit transformés. Le réemploi sur chantier reste l’apanage des gros chantiers de démolition. Peu de produits, en rénovation d’habitat individuel par exemple peuvent être inclus dans le processus de production sauf, peut-être, pour les terres excavées.
- Certaines catégories de produits, pour des usages spécifiques, peuvent être récupérées directement. C’est le cas, courant, pour les éléments de charpente en bon état, voire les tuiles, les parquets, les carrelages, etc.
- Il se crée de plus en plus des bourses aux matériaux, des négoces de matériaux récupérés. Les sites de petites annonces proposent également des offres pour des produits neufs de fin de chantier. Les quantités sont souvent modestes mais suffisantes pour un particulier ou une intervention ponctuelle.
Le diagnostic des déchets
Le diagnostic PEMD
C’est un vieux serpent de mer. Tout d’abord, l’obligation de réaliser un diagnostic déchet préalable à la démolition d’un bâtiment est obligatoire depuis 2011. Depuis une loi de 2020 et ses décrets d’application, cette obligation prend la forme d’un diagnostic Produits/Equipements/ Matériaux/Déchets (PEMD). Il s’applique aux opérations de démolition ou rénovation significative engagées à partir du 1er juillet 2023 (arrêté du 26 mars 2023).
Il concerne les opérations de démolition ou de rénovation significative de bâtiments dont la surface cumulée de plancher de l’ensemble des bâtiments concernés est supérieure à 1 000 m2 ou ayant accueilli une activité agricole, industrielle ou commerciale et ayant été le siège d’une utilisation, d’un stockage, d’une fabrication ou d’une distribution d’une ou plusieurs substances classées comme dangereuses.
Tout cela prend la forme d’un «formulaire de récolement» CERFA n°1687-01. Il faut le déposer… par mail ou directement sur la «plateforme PEMD» gérée par le CSTB. La réalisation de ce diagnostic est de la responsabilité du maître d’ouvrage. Actuellement, il n’y a pas de certification spécifique pour être diagnostiqueur PEMD. Et c’est au maître d’ouvrage de justifier de sa compétence. Il ne fait pas de doute que, lorsque tout cela sera à peu près calé, l’obligation s’étendra à tous les chantiers de démolition ou rénovation. Les groupes privés spécialisés dans le contrôle et le diagnostic proposent tous cette option « clés en main ».